Mettre des mots sur les maux…

 

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Mettre des mots sur les maux.

Écrire. Dans l’urgence, dans la douleur.

Écrire pour figer ces moments effroyables en les emprisonnant dans des phrases. Écrire, c’est brûler vif, mais c’est aussi renaître de ses cendres, affirmait Blaise Cendrars…

Écrire, n’importe quoi, mais le faire ; comme une nécessité,  ce qui ne peut pas ne pas être, écrire pour résister à ce qui ne sera plus.

Il était comme mon père et peut-être plus encore, parce que le père, « ce n’est pas celui qui a donné la vie ou celui qui paie les biberons. C’est celui qui aime », disait Pagnol. D’une certaine manière, on s’était choisi. J’avais deux ans quand il a épousé ma mère et décidé de m’élever. Il a su apprivoiser l’enfant que j’étais alors et nous avons tissé, au fil du temps, une très belle relation père-fille dont je suis demeurée riche toute ma vie.

Nous vivons une horreur.

Privée de le voir et de le réconforter tandis que sa jambe se gangrène, c’est moi que l’on ampute de la douceur que je voudrais lui offrir. Je ne peux que m’assurer, à distance, qu’il n’y ait aucun acharnement thérapeutique.

Médecin, il a aidé, au cours de sa vie, des gens à partir sans souffrir, dans la dignité. Gardienne de son temple, je veille à ce que ce soit son tour. L’équipe médicale de la clinique qui l’a pris en charge est extraordinaire. Savent-ils seulement combien leur humanité et leur professionnalisme sont un baume sur mon chagrin ? Je les applaudissais chaque soir. Mais depuis quelques jours, je vis cet hommage avec une intensité poignante. J’ai envie de leur crier « merci, merci, merci ! ».

Surmonter la douleur. Ne garder que nos soleils, la lumière de ces enfance et adolescence qu’il m’a offertes dans une famille aimante et unie. Je me félicite d’avoir croisé sa route, même si elle prend fin. Quelle chance fut la mienne ! Ce cadeau ne disparaîtra pas avec lui.

De ce passé lumineux, je recueille tout vestige, dans ce soir dont les larmes ont chassé l’harmonie. Ces images des jours heureux m’éclairent et me guident, comme un pont tendu vers l’infini. Je traque les madeleines de Proust, cherchant des refuges, avide de tout ce qui peut me ramener à cette bienheureuse époque enfuie. La phrase de Pagnol que j’ai tant de fois citée, résonne en moi : « Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. » Une fois n’est pas coutume, je vais m’employer à contrer cet immense écrivain qui m’accompagne depuis tant d’années. Pour Bernard, dont le souvenir luit à jamais en moi, je veux continuer à sourire. Nous avions un attachement essentiel. Il sera mon appui. La résurgence de la mémoire fera le reste et j’emploierai toute ma volonté à effacer justement ce chagrin par nos inoubliables joies.

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