Nous ne sommes pas en guerre : nous sommes en panique !

Au sommet de l’État, comme sur les plateaux de télévision, la rhétorique martiale est de mise. « Nous sommes en guerre » répète-t-on à l’envie. Des voix se sont élevées, notamment celles des gens qui ont vécu ces périodes si singulières de notre histoire, pour dénoncer ce champ sémantique impropre. Impropre car le virus SARS COV 2 n’est pas un ennemi mais un agent infectieux contre lequel nous devons nous prémunir et qui, nous l’espérons, disparaîtra grâce à un vaccin. Impropre aussi parce que ce même virus n’a ni intention politique, ni projet de conquête territoriale, ni stratégie d’invasion ou de purification ethnique.

Il ne faut pas tout confondre.

Il est peut-être temps de réfléchir au sens des mots, qui influencent notre perception du monde et notre capacité à agir.

Regardons la réalité en face :

Nous ne sommes pas en guerre ; nous sommes en panique.

Et cette panique nous fait adopter l’attitude inverse, justement, de celle que nous aurions en temps de guerre.

Parce qu’en temps de guerre, précisément, nous n’aurions d’autre choix que celui du courage.

Précédemment, dans plusieurs de mes articles, j’ai établi un parallèle avec les conflits qui ont ensanglanté le XXe siècle. J’avais observé que l’on envoyait naguère les hommes au front, lesquels quittaient leurs foyers pour aller mourir, quand on nous demande, à nous, de rester chez nous pour vivre. Ceci n’est pas anodin, car l’antithèse ne s’arrête pas là.

Reprenons ce parallèle établi sans cesse avec une supposée guerre dans laquelle nous serions soi-disant engagés.

Lorsque la nation s’est trouvée en péril, lorsque notre liberté fut menacée et notre souveraineté compromise, les Français furent debout et, la peur au ventre, sont allés nous défendre, nous, générations suivantes. Ils ont donné leur sang pour que nous soyons libres, pour vaincre un totalitarisme qui menaçait de nous engloutir et d’oblitérer notre avenir pour de très nombreuses années.

Que faisons-nous, aujourd’hui, pour la France de demain ? En quoi protégeons-nous les générations futures comme nous ont protégés les générations passées ?

Le slogan aliénant qu’on nous rabâche est le suivant : « si je me protège, je protège les autres ».

Là est tout le dévoiement de ce discours martial impropre.

J’ai été heurtée de plein fouet par cette maladie, par le tri effectué par un hôpital débordé, par l’accumulation de cadavres qui fait que même les services de pompes funèbres ne peuvent fonctionner normalement.  Aujourd’hui, ma mère, dont je suis extrêmement proche, est une personne à risques, compte tenu de son âge et de ses antécédents médicaux. Est-ce que pour autant cela m’empêche de prendre le recul nécessaire et de réfléchir ?

J’ai grandi dans une famille de médecin. J’ai défilé contre le massacre de l’hôpital, le numerus clausus, les restrictions budgétaires. Je sais la pénibilité de toutes ces professions de santé et personne n’est plus que moi respectueuse du travail des soignants. C’est sur eux que devrait se porter cet effort de guerre dont on nous parle, justement. Tous ces milliards gaspillés dans du chômage partiel destinés à des gens qui ne demandent qu’à travailler devraient légitimement servir à soutenir les hôpitaux, à payer davantage nos soignants, bref à étayer le système actuel qui est chancelant.

Or quelle est l’option choisie ? Nous mettons notre pays à l’arrêt, nous stoppons notre économie, nous hypothéquons l’avenir des générations futures par un surendettement colossal pour nous protéger, NOUS. Pourquoi ? Parce que nous avons peur ! Et l’imposture est de nous faire croire que nous agissons au nom du bien commun, par générosité pour les soignants, par altruisme pour les gens à risques.

C’est tout l’inverse.

Nous sommes assujettis à des mesures iniques qui transforment notre pays en une nation de couards. Notre attitude est à l’opposé du courage. Nous sommes d’un égoïsme forcené en ne regardant que notre propre sécurité, à court terme, et en détournant les yeux de tout ce que nous massacrons pour les années à venir. Nous comptons les 500 morts par jours pour oublier les centaines de milliers de gens que nous assassinons en silence.

Et j’ai honte.

Par-delà le temps, mon arrière-grand-père, tombé au chemin des dames en 1917, m’interroge. Qu’advient-il de son sacrifice ?

Ma grand-mère, qui a été accoucher, lors de la seconde guerre mondiale, munie de son ausweis[1] s’étonne de cette attestation que je remplie… pour m’autoriser (!!) à aller faire mes courses !

Lors des deux grands conflits mondiaux, a-t-on entendu nos dirigeants déclarer « ne partez surtout pas au front défendre votre pays, car avec tous les blessés, nos hôpitaux pourraient être engorgés ? ».

Oui, j’ai honte de ce que nous sommes devenus.

Des gens assis sur notre quant-à-soi, sans aucune vision du futur. Notre avenir est à quinze jours et nos préoccupations consistent à savoir si on pourra se réunir pour fêter Noël…

Que sera la France de demain, quelle sera sa place et son rayonnement dans le monde ? Nos enfants auront-il de quoi travailler, se nourrir, avoir une famille ? Auront-ils seulement de l’espoir ? Nous n’en avons cure. Il y a 0,05% de malchances de décéder de la Covid dans un hôpital saturé, alors, vous pensez, on pare au plus pressé !

Nos dirigeants se sont mués en des affligeants. Ils entretiennent cette peur qui nous soumet, en prétendant que nous sommes les héros d’une guerre que grâce à eux, nous devrions gagner.

Il n’y aura pas de gagnant, car nous sommes en train de tout perdre. Notre liberté, notre dignité, notre économie, nos entreprises, notre système de santé que nous ne pourrons définitivement plus financer, nos perspectives de croissance et notre cohésion nationale. Nous serons surendettés à un point tel que toute idée de souveraineté aura disparu. Nous entrons dans une récession économique si importante que le chômage et donc la grande précarité, la dépression, les suicides et la délinquance ne pourront qu’exploser.

Mais qu’on se rassure : nous aurons eu le grand courage de nous confiner en attendant que tout cela advienne.

Ouvrons une bonne fois les yeux : un chef de guerre ne dit pas à ses troupes « restez chez vous » !

Non.

Un chef de guerre prend la parole, seul contre tous, contre la prudence, contre la lâcheté et l’esprit de Munich. Il part à Londres et rassemble ses troupes pour les mettre en ordre de bataille.

Un chef de guerre ose dire à un parlement soumis « We shall never surrender ! ».

[1] laisser-passer délivré les Allemands qui occupaient alors la France.

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